Olivier Beaudet n'est ni peintre, ni photographe.
Pourtant, si ses images numériques empruntent à l'un et à l'autre, ses
préoccupations ne se situent pas exclusivement dans le champ de la
peinture ou dans celui de la photographie. Il s'agit d'un travail
d'idée et d'expérimentation.
Lorsqu'il
abandonne le pinceau pour l'outil informatique, l'image s'impose comme
l'équivalent du pigment. Elle devient alors plus un prétexte qu'une
finalité. En témoignent le recours aux photographies anonymes, le plus
souvent libres de droit, puis la prédilection pour les thèmes
populaires, banalisés et de ce fait vidés de sens. L'image devenue
matière première est alors jouée ou déjouée dans de ludiques
interprétations graphiques qui produisent des décalages surprenants,
parfois trompeurs et souvent investis d'humour.
Si
le premier coup d'œil oriente l'interprétation vers le dessin,
l'illusion n'est pas une fin. Le processus de création reste donc
identifiable. En revanche l'hésitation suscitée est bien délibérée.
Soudain, lorsqu'on découvre une autre réalité, plus photographique, le
premier regard se brouille puis s'évapore. Cependant le balancement
constant d'une réalité à l'autre perdure. Cette oscillation perceptive
rend visible l'envers de l'image et révèle l'usage comme réceptacle de
projection subjectives qu'on lui improvise.
Dans
cette critique du réalisme objectif, ce n'est pas l'objet qui est en
question, mais bien le regard qu'on porte sur lui. Voilà mis en
évidence et d'une manière toute singulière, combien la croyance joue un
rôle décisif dans l'appréhension de l'œuvre. Elle anticipe et détermine
la relation. Je vois ce que je crois. Or, si les attitudes de chacun
d'entre nous diffèrent face à l'œuvre, c'est vraisemblablement parce
qu'on ne voit pas tous et pas toujours la même chose dans ce qu'on
regarde.
Cette
démarche atypique nous offre bien plus qu'une simple expérience
rafraîchissante de l'image. Elle permet, sous un aspect inédit,
d'interroger les liens que nous tissons avec les objets qui nous
entourent et nous prolongent.
Olivier Beaudet
Olivier Beaudet, Réalités subjectives 1.2, visuelimage.com , 2000
iconographie : olivier beaudet, good boy, encre sur papier, 2000