• Une peinture en guise de genèse, voilà le commencement paradoxal de cette œuvre. L'intérêt accordé ici à cette pratique picturale se justifie à plusieurs titres. Si l'on excepte l'aspect documentaire, étant donnée la jeunesse de l'œuvre, les tableaux d'Olivier Beaudet permettent de saisir combien la rupture introduite par l'emploi de photocopies ratées fut radicale. Il y eut sans doute là quelque chose d'une révolution plastique intime.


    L'interprétation hâtive omet pourtant combien l'artiste est resté attaché à la peinture. Il la poursuit alors cinq années de plus. Les recherches se côtoient. Elles se répondent. En témoignent les tableaux «furtifs», ces peintures dont on ne peut avoir d'appréhension qu'incomplète ou fragmentaire. Peints ton sur ton, avec des mélanges de laques et de peintures acryliques, les tableaux se dérobent au regard. Les insaisissables motifs abstraits se dissimulent derrière les reflets que provoquent les laques sous éclairage. En revanche, éloigné de toutes sources lumineuses, le tableau semble se fondre dans l'obscurité.



    La peinture a toujours constitué un terrain privilégié d'expérimentation. Loin des moyens conventionnels d'application des pigments, Olivier Beaudet use de lames de cutter, de bâtons, puis il expérimente le dripping jusqu'à la découverte de Jackson Pollock. Enfin, il applique et mélange la matière picturale à même le support en réduisant au plus possible l'intervention directe de la main. Il n'est pourtant pas question de hasard, mais bien d'un contrôle global. Sa peinture est une quête intime de l'authentique qui répond à une nécessité intérieure.


    Les années d'étude de l'histoire de l'art l'ont amené à observer une attitude critique face à l'art. Son travail devait s'en ressentir. Cette impulsion critique, imputable à Michel Costantini et Eric Darragon, lui aura permis de réorienter son intérêt pour les relations que nous entretenons aux images. Il fallait mener à mal l'icône, débusquer les idéologies. On comprend alors combien les préoccupations métaphysiques et l'acte autobiographique pouvaient, de ce point de vue, représenter un enfermement qui légitimait le sentiment que ce travail ineffable appartenait au domaine privé. Désormais, il est conçu comme une véritable recherche critique, un débat ouvert.


    L'exigence nouvelle donnait un sens pragmatique et public à cet art plastique. Olivier Beaudet s'en réjouit avec l'espoir qu'il se partage.

     

     

     


    1998. Tiré du chapitre introductif de la démarche artistique d'Olivier Beaudet du site web, rubrique «genèse». olivierbeaudet.fr.st n'est plus disponible en ligne depuis 2002.

    iconographie : olivier beaudet, anamorphoses, laques, 1996

     

     


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